samedi 10 septembre 2011

Le débat contradictoire: dans les livres seulement ?

Peu d'infos sur les anti-nucléaires arrivent à passer à la télévision japonaise, ou dans les journaux. On a le sentiment d'une propagande pro-reconstruction et d'un grand silence sur les conséquences de l'accident nucléaire... Ou du moins, il y a des infos, mais rien qui dise clairement que Tepco et le gouvernement ont menti. Rien qui pourrait inciter à la protestation active.

Comme le dit l'historien Pierre-François Souyri dans cet article , c'est plutôt dans les livres qu'il faut aller chercher les infos contestataires et les analyses indépendantes. Et effectivement, j'ai été faire un tour dans une des plus grandes librairies de Tokyo, la nouvelle librairie Kinokuniya à Shinjuku. Près de la porte d'entrée, j'ai trouvé un rayon spécial dédié aux "livres qui réfléchissent sur la catastrophe de l'Est du Japon, la prévention des catastrophes, le nucléaire, la radioactivité, et l'après-catastrophe".


Mais en fait, la majorité des livres parlent bien du nucléaire, et ils ont l'air plutôt virulents. Voici ce qu'on trouve, avec une traduction de quelques titres choisis:


"Les énergies nouvelles changent le monde", "Les mensonges du nucléaire", "En finir avec la société nucléaire", "On n'a pas besoin du nucléaire", "La radioactivité est tombée sur de beaux villages"...




"Interroger les grands crimes de la mafia du nucléaire", "La nourriture contaminée par la radioactivité", "Cartes des hotspots radioactifs"
"La vérité sur la radioactivité"; "Pourquoi la radioactivité est effrayante"; "Se libérer des mythes du nucléaire"


"Manuel d'utilisation des compteurs Geiger", "Pour une société qui ne repose pas sur le nucléaire", "Avant de devenir Tchernobyl", "La fusion des réacteurs"




"Le danger de l'électricité", "la vérité sur Fukushima"


 "La radioactivité à l'intérieur du corps", "Comment protéger les enfants de la contamination radioactive", "Manuel pour protéger sa vie"


"Parler en famille de la contamination radioactive de la nourriture". Celui porte en bandeau la mention "édition d'urgence".

Tout ces livres montrent bien que les Japonais ne sont pas naïfs, et qu'ils savent ce qu'il faut faire pour prendre leur destin en main, se protéger. 
Mais je ne partage pas le relatif optimisme de Pierre-François Souyri: si les critiques ont les moyens de s'exprimer dans les livres, et même si, relativement à d'autres pays industrialisés, le Japon compte énormément de lecteurs cultivés qui achètent beaucoup de livres, il est évident que ce media a une visibilité bien mince par rapport à la télévision ou aux journaux... lesquels rapportent un discours ambiant, fait d'évitements et modelé par des tabous omniprésents. Je ne pense pas que cela suffise à informer, et à alerter la majorité de la population, malheureusement.