dimanche 6 février 2011

We don't care about music anyway

Je suis allée voir un documentaire un peu par hasard, parce que l’ami d’un ami était le réalisateur. Pas convaincue en entrant, mais complètement emballée en sortant. Je me suis dit qu’il fallait que je partage l’info, même s’il date déjà de 2009, pour le faire connaître, et éventuellement que vous ne passiez pas à côté si vous avez la chance de le voir. Ce documentaire, c’est « We don’t care about music anyway », de Cédric Dupire et Gaspard Kuentz.



Deux français donc, vivant au Japon et familiers de certaines scènes musicales expérimentales et avant-gardistes, qui ont choisi de dresser un portrait sonore halluciné de Tokyo. Le propos :

« une vision kaléidoscopique de Tokyo, confrontant musique et bruit, sons et images, représentation et réalité,  fiction et documentaire. […] Au-delà de la musique, et au-delà de la performance, se jouent l’avenir et les modalités d’existence d’une ville et d’une société entière. »

Des images saccadées et une bande-son qui grince, qui hurle, stridente jusqu’à la limite du supportable. Des artistes charismatiques et habités par leur recherche d’un son, d’une expression nouvelle. Il y a des déchetteries géantes, des buildings à perte de vue, des trains qui n’en finissent plus de se remplir, la rue envahie de hauts-parleurs, et, parmi les figures les plus marquantes, un violoncelliste, Sakamoto Hiromichi, qui fait subir mille tortures à son instrument pour en tirer les sons les moins « bourgeois » possibles (d’après ses mots). Ou Yamakawa Fuyuki, qui branche des capteurs sur sa peau, sur son cœur ou son nez, pour produire des rythmes en contrôlant son souffle et en tapant sur son crâne. Une autre vision qui reste longtemps en tête ; celle des « Umi no Yeah ! » qui jouent sur une plage de fin du monde, les amplis à fond entre les déchets, les éoliennes et les mouettes.

Ce qui vient à l’esprit c’est l’absurdité, la vacuité de toute l’agitation de Tokyo, comme une boule d'énergie géante qui tournerait à vide. Mais aussi la recherche du bonheur de quelques individus, par leur démarche de création. Tout ceci pourrait sembler un peu hermétique, mais dans plusieurs petites séquences, les musiciens réfléchissent sur eux-mêmes et donnent quelques clés. Yamakawa dit que le sens du bonheur des Japonais est « fin », léger… superficiel ? Ils étaient programmés pour un schéma rivé à la croissance économique de leur pays : avoir un bon travail, se marier, avoir des enfants, et aller faire les courses au supermarché ensemble le dimanche. Aujourd’hui pour eux c’est terminé, il n’y a plus rien à espérer de ce chemin tout tracé, alors leur but, c’est de trouver autre chose.

La réussite du film, c’est qu’il donne envie de chercher aussi.

La bande annonce :



Le site pour connaître les prochaines projections (festivals, salles de ciné indépendantes) : http://www.studio-shaiprod.com/wdcama.php

1 commentaire:

  1. J'ai vu ce documentaire en 2009 dans un festival, comme toi ça ne m'emballait pas énormément au début et j'y suis allée surtout pour le titre que j'adorais... Et ça a été un énorme coup de coeur ! La musique, qui s'apparente plus à du bruit, est super bizarre mais très travaillée, mais la lumière et l'image le sont aussi, du coup ce film est un peu une expérience... J'avais l'impression d'être dans une montagne russe en le regardant... Et la critique de la société japonaise est super intéressante, bien intégrée au film, j'ai trouvé ;) (le passage où quelqu'un explique que le bonheur à la japonaise, c'est aller à Jusco dans une grande voiture le dimanche, j'ai trouvé ça très juste)

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